- Alors que Bereal fait son nid, que Tiktok cartonne et que Facebook meurt lentement, Youtube s’accroche. La plateforme de streaming qui a longtemps divertit les jeunes générations fait désormais face à des concurrents de taille sur le marché du contenu. Les habitudes des utilisateurs se transforment au gré des évolutions sur les réseaux sociaux, et on croirait presque que Youtube n’est plus de la partie.
Article écrit par Laury Peyssonnerie
Aux origines de la création de contenu
Si vous étiez adolescent dans les années 2010, vous vous souvenez sans doute des tendances de l’époque sur Youtube. Au début, ils/elles n’étaient que quelques un.e.s à se filmer dans leur chambre. Puis, Enjoy Phoenix et Cyprien ont fait de la place à une ribambelle de créateurs de contenus. Entre les vlogs lifestyle, les tutoriels beauté, les sketchs et les parodies, Youtube voit fleurir bien des personnalités.
Au fil des années, Youtube n’est plus seulement un terrain de jeu : certains se démarquent et la monétisation sur la plateforme va leur permettre de vivre de leur passion. C’est à cette période qu’est né le métier d’influenceur, un terme qui place le travail des créateurs de contenus sous un tout nouveau jour. Tandis qu’ils/elles publient des vidéos longs formats sur leurs sujets de prédilection, les réseaux sociaux comme Instagram entretiennent leur notoriété.
Puis, la professionnalisation des contenus a peu à peu transformé les prises de paroles sur la plateforme. Les fonds de chambre d’ado se sont transformés en studio, et les contenus ont gagné en qualité. A l’instar de la Red Box ou de Maison Grise, des collectifs de Youtubeurs ont même fini par se réunir pour offrir à leur abonné.e.s une expérience de plus en plus travaillée.
Et un jour, les temps ont changé
Alors que la plateforme vient de vivre son âge d’or, les concepts commencent à s’essouffler. Youtube regorge désormais de partenariats, de haul, d’unboxing ; en sommes de superficialité. Or, en 2020, ces valeurs ne semblent plus être alignées avec l’état d’esprit du public. Depuis que la crise sanitaire a montré le bout de son nez, les confinés ont besoin de plus d’authenticité. Si, à l’origine, les youtubeurs étaient appréciés pour leur personnalités, ils ont fini par tous se ressembler. Tous bien rangés, avec un set-up pro, au point qu’on ne puisse plus s’y identifier.
C’est alors que certaines plateformes sont sorties de l’ombre pour raviver le naturel. En seulement quelques mois, elles ont radicalement transformés nos habitudes de consommation de contenus.
Alors que Twitch démocratise le live, de nombreux créateurs de contenus migrent vers le monde du stream. Comme sur Youtube, les contenus sont divers et variés mais en mieux car les spectateurs ont la possibilité d’interagir en direct. Cela instaure un tout autre rythme de visionnage qui peut durer parfois plusieurs heures quand une vidéo Youtube ne durera que le temps d’un repas. La plateforme a notamment fait ses preuves lors d’évènements comme la Pixel War ou encore le GP Explorer organisé par Squeezie. S’ils sont moins structurés et plus longs, ces contenus sont aussi plus spontanés, une réponse avérée à la recherche d’authenticité déclamée par la Gen Z.
Puis, sur le podium des applications les plus utilisées en 2023, est arrivé le réseau social le plus décrié : Tik tok. S’il fait le bonheur des uns et inquiète les autres, il a définitivement bouleversé notre rapport au temps. Désormais, les scrolls par millions démontrent sans aucun doute le pouvoir des vidéos courtes. La raison est simple : le renouveau continuel stimule la dopamine jusqu’à rendre accro. Alors on perd patience, au rythme des musiques sped up en tendance, tout doit aller vite.
Plus le choix pour le roi du long format
Le besoin d’authenticité de la génération Z laisse naturellement place à cette ère de l’instantané. Même les plus grands adeptes du Netflix & chill finissent par perdre l’attention devant leurs séries favorites. Les pouces scrollent inlassablement, et les créateurs de contenus nés sur Youtube voient en TikTok et Twitch de nouvelles possibilités. Ils peuvent désormais compter sur un algorithme qui multiplie les vues et l’engagement, pour des coûts diminués.
Ce qui expliquerait pourquoi des contenus qui, autrefois, faisaient des records de vues, sont aujourd’hui délaissés. On pense fort au dernier court métrage d’un des premiers créateurs de Youtube :
C’est le tournage dans lequel je me suis le plus investi, c’est le PIRE lancement d’une vidéo sur ma chaîne. Coup dur. J’en reste cependant pas moins fier et vos messages me font très plaisir. https://t.co/BH1DrqzVHt
— cyprien (@MonsieurDream) December 24, 2022
Face à cela, Youtube a tenté de s’adapter. À l’heure du renouvellement, ils ont d’abord présenté Youtube Live, puis, les Shorts. Ces deux fonctions ne vous sont probablement pas inconnues (ou ça fait vraiment longtemps que vous avez déserté la plateforme). Mais la question qu’on se pose tous, est : recréer ce qui fonctionne chez les concurrents suffira-t-il à le sauver ?
SPOILER : un bilan mitigé
Pour l’instant, et malgré ses tentatives de renouveau, Youtube ne convainc pas tout le monde et continue de vaciller. Certains comme Squeezie ou Mcfly & Carlito tentent malgré tout de prouver le contraire en alimentant leur chaîne avec de nouveaux concepts. Or TikTok et Twitch sont devenus la norme là où Youtube respire l’ennui. Et, en même temps, c’est logique : pourquoi irait-on regarder des Shorts sur Youtube alors que Tiktok propose déjà le meilleur du contenu court ?
En clair, ces mises à jour, qui auraient pu le faire décoller à nouveau, font finalement perdre à Youtube toute son essence. Et pour en remettre une couche, la plateforme a même modifié les règles du jeu pour les créateurs de contenus. Les injures – qui témoignaient encore du naturel de certains créateurs – sont désormais interdites, sous peine de voir son contenu démonétisé.
Si ces conclusions sonnent presque la fin d’une époque, on entrevoit malgré tout une petite lueur d’espoir. Début février, Youtube annonce vouloir augmenter la monétisation sur les Shorts pour encourager les créateurs à publier davantage de contenu court. À l’origine, les Shorts rapportaient déjà en moyenne un centime de plus que sur TikTok toutes les 1000 vues. Espérons que ces 100 millions de dollars supplémentaires permettront à Youtube de regagner son public… sinon, merci quand-même pour toutes ces belles années.