Bilan à mi-parcours d’Euphoria, saison 2 : The show must go on 

Plus de deux ans après la diffusion de sa première saison, le géant des séries sur le thème du coming of age revient sur nos écrans en ce début d’année pour un second acte. Derrière ou devant la caméra, on retrouve des noms familiers, avec Sam Levinson comme scénariste et showrunner, Labrinth pour la musique originale et entre autres les actrices Alexa Demie, Zendaya, Hunter Schafer et Sydney Sweeney. Les attentes des fans sont au plus haut après deux ans d’attente et de nombreux téléspectateurs spéculaient déjà avant sa diffusion sur les différentes intrigues et thèmes que l’on pourrait trouver dans cette saison. Après la diffusion du quatrième épisode, marquant son mi-parcours, il est temps de faire le point sur le début de cette saison 2. 

Article écrit par Cloé Garnier

Maddy, Nate & Cassie 

Bien que le couple se soit séparé à la fin de la première saison, le duo Nate et Maddy continue d’illustrer l’impact psychologique que peut avoir une relation malsaine. Après avoir subi des violences physiques, des traumatismes émotionnels, des agressions verbales et des violences domestiques de la part de Nate, les téléspectateurs constatent que Maddy est toujours sous l’emprise de ce dernier. Car si à la moitié de cette saison 2, Nate n’a encore rien commis d’illégal -une amélioration par rapport à la saison précédente-, il ne faut pas se méprendre, le côté abusif et manipulateur de son personnage est toujours bien présent. En effet, de nombreuses spectatrices racisées ont noté l’importance dans le scénario de la recherche par Nate de l’exemplification de la féminité, incarnée pour lui par Cassie, avec laquelle il va entamer une relation amoureuse bien qu’elle soit la meilleure amie de Maddy. Car Cassie est tout ce que Maddy n’est pas : très douce et candide, mais surtout blanche, blonde, aux yeux bleus. On devine aisément le racisme souligné par cette réflexion de Nate, déshumanisant et sexualisant une femme de couleur tout en associant féminité et vulnérabilité à une femme blanche. Quant à Cassie, deux camps se forment au sein du public. Certains déplorent et dénoncent cette tentative à peine dissimulée de faire passer Cassie pour une victime bien qu’elle cache activement sa liaison, utilisant une fois de plus sa blancheur pour incarner la demoiselle en détresse, innocente et naïve. Tandis que d’autres soulignent le parallèle entre les figures masculines du personnage de Nate et du père de Cassie, arguant que son personnage ne fait que refléter sa quête incessante de validation masculine due à ses traumatismes d’enfance. 

Kat et la positivité toxique 

L’une des scènes les plus justes et les plus poignantes de ce début de saison est celle de Kat au début de l’épisode 2. Consumée par ce besoin incessant de positivité et la déferlante du mouvement body-positivity, scandé et relaté sur les réseaux sociaux, le personnage de Kat craque. Sa scène de dialogue avec des influenceuses témoigne de cette injonction à se trouver belle, résiliente et forte en toutes circonstances. La scène montre combien il est facile pour les jeunes filles de se sentir obligées de se conformer aux standards de beauté sur les réseaux sociaux ou à un mode de vie toujours plus positif et sain, sans vraiment laisser de place à une quelconque émotion négative. 

Lexi et la déréalisation  

Le personnage de Lexi, peu mis en avant lors de la saison précédente, met un pied dans la lumière. Si sa dynamique avec le personnage de Fez fait l’unanimité, c’est au cours de l’épisode 3 que le personnage de Lexi se révèle, laissant place à ses troubles psychologiques. Incapable d’affronter ses problèmes familiaux, Lexi se perd dans la déréalisation. Elle s’imagine que sa famille n’est pas vraiment sa famille, que les scènes qui se déroulent devant elle ne sont pas vraiment réelles. L’utilisation de son imagination pour éviter de faire face à des événements émotionnellement épuisants ou traumatisants aboutit à une incroyable scène de rupture du 4ème mur, où elle s’imagine être le réalisatrice de sa vie, qui serait en fait une émission de télévision.

Rules et le traitement de leurs identités 

Parmi les plus grandes critiques et déceptions de cette saison figure l’intrigue du couple Rue et Jules. Réunies à la hâte dans l’épisode 1, le couple est propulsé prématurément dans un triangle amoureux avec le personnage masculin d’Elliot dans l’épisode 2, alors que les deux personnages se définissent en tant que lesbiennes. Entre mensonges et tromperies, le triangle amoureux ne brise pas seulement la relation de Rue et Jules, il détruit aussi presque complètement le développement du personnage de cette dernière. Après avoir affirmé à plusieurs reprises sa sexualité et abordé son expérience de la dysphorie de genre en tant que femme transgenre, elle revient à la case départ en train de gérer l’addiction de Rue et en cherche d’attention masculine. Le montage vidéo qui ouvre l’épisode 4 reflète cette dualité. Si le couple de Rules est poétiquement représenté en travestissant certains des couples les plus iconiques du cinéma, aucun des plans ne fait référence à un média lesbien, et met plutôt Jules et Rue à la place de relations hétérosexuelles. Un choix pourtant justifié pour de nombreux spectateurs, qui y voient la représentation d’histoires d’amour tragiques, présageant pour certains la mort du personnage de Rue. 

Cal & l’homophobie intériorisée

Grande surprise pour cette première moitié de saison 2, la backstory de Cal -largement détesté pour être un prédateur sexuel- démontre pourtant avec sensibilité comment des décennies d’homophobie intériorisée ont pu avoir un impact négatif et traumatisant sur les aînés de la communauté LGBTQ+. 

Rue & l’addiction 

On s’y attendait mais on ne s’y habitue toujours pas, le personnage de Rue se bat toujours contre ses diverses addictions. La descente aux enfers de Rue la montre en train de gaslight des personnages se souciant d’elle telles que Gia, ou coupant les ponts avec des personnages la soutenant comme Ali et puis Jules. On retrouve lors d’une magnifique scène, comme lors de la scène finale de la saison 1, un morceau de Labrinth résumant à la fois le deuil, la fatigue émotionnelle et la tristesse de Rue. La chanson intitulée I’m Tired”, renvoie aux pensées intérieures de Rue. Au fur et à mesure du déroulement de la scène, le public participe au chagrin que lui cause la perte de son père. C’est un élément clé de sa caractérisation, qui n’est pas la seule raison de sa consommation de drogue, mais un élément aggravant son incapacité à surmonter ses traumatismes.

Pour résumer, de nombreuses critiques sont faites à l’égard du scénario de cette saison 2, qui pour l’instant montrent ses personnages féminins – pourtants iconiques, incontournables et indissociables à la série- comme n’ayant que peu d’impact sur leurs propres storylines, autre qu’en gravitant autour de personnages masculins. Une partie conséquente des épisodes est à chaque fois tournée vers Cal et Nate, laissant les spectateurs dans le flou quant à des storylines très intéressantes qui ont tout simplement été abandonnées. La storyline de Kat aurait pu déboucher durant la saison deux sur une vraie critique de l’hypersexualisation des mineures dans notre société, et la notion d’”empowerment” au sein du féminisme libéral. Tout comme l’arc narratif de McKay, qui dépeignait un homme noir aux États-Unis victime d’agression sexuelle, tout simplement tombé dans l’oubli. À mi-parcours, tensions et suspens restent au cœur du scénario, quant à l’addiction de Rue, aux secrets de Cassie ou encore à la dynamique entre Fez et Lexi. On attend encore des performances extraordinaires de la part de Zendaya, une BO saisissante par Labrinth et des retournements de situations à couper le souffle. 

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