Fredrika Stahl est une artiste suédoise qui surprend, intrigue, elle laisse cours à sa créativité musicale et en démontre l’étendue avec son univers mystérieux et romantique. Alors qu’elle sort son quatrième album en 2014, elle travaille avec Cyril Dion et Mélanie Laurent pour le film Demain. Sa chanson The World To Come est un succès. Le 29 janvier, son clip Electric la dévoile, libre, la nuit, dans un Paris confiné. Sans cesse porteuse de nouveaux projets, c’est son album Natten qui sort aujourd’hui.
Propos recueillis par Maude Vuillez
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je suis une autrice compositrice suédoise basée depuis longtemps à Paris. Je vais bientôt sortir mon 5e album. 😉
Ton album Natten signifie « la nuit » en suédois, pourquoi ce titre ?
La nuit est un monde parallèle. On plonge dans une dimension plus profonde, plus mélancolique, plus créative. Ce qui existe la nuit disparaît une fois le jour levé pour laisser place à la raison et au pragmatique. Dans le nord, la nuit joue un rôle particulièrement important. Elle nous est imposée excessivement par périodes, puis nous en sommes complètement privés. Cet album est le fruit de ces longues nuits hivernales passées en Suède au cours des deux dernières années, j’ai donc choisi de nommer ce nouveau projet Natten.
Turn of life, dont les paroles sont très touchantes, est d’une grande beauté. « I don’t wanna be emotional… ». Parfois, notre profonde tristesse ne nous permet-elle pas de nous relever, plus fort.e que jamais ?
Je suis quelqu’un d’une grande sensibilité. Plus jeune, je le voyais comme un vrai handicap, j’avais l’impression que ça m’empêchait de fonctionner normalement. C’est assez fatigant de tout prendre à cœur mais je me suis vite rendu compte que cette même sensibilité est ma plus grande source d’inspiration. J’essaye de le voir d’un point de vue positif et quand ça ne va pas j’essaye de me rappeler que je vis les choses de manière amplifiée… et qu’en réalité, ce n’est sûrement pas si grave.
Midsommar (Aster, 2019) a-t-il été source d’inspiration pour le clip Rescue me ?
Je n’ai pas vu Midsommar… étant justement hypersensible, je ne supporte pas les films d’horreur. Mais tu n’es pas la première personne à me dire qu’il y a une ressemblance. En même temps ce n’est pas très étonnant puisque j’ai cherché à retrouver une ambiance scandinave avec la nature, la vénération du feu (comme pour la fête de Valpurgis), la couronne de fleur (comme pour la fête de Midsommar/La St-Jean).
Ton clip Electric est une ode à la liberté dans un monde confiné. Peut-on y lire un double message ? Celui de l’envie, en tant que femme, d’errer sans crainte en pleine nuit ?
Non je ne l’avais pas pensé comme ça… 😉 Mais c’est intéressant ! Dans le clip les lumières reflètent mon état d’âme. Je suis à la recherche d’un proche que j’ai souvent l’habitude de récupérer en miettes. J’erre dans les rues désertiques et je deviens de plus en plus électrique. C’était assez incroyable de tourner ce clip dans un Paris confiné.
Finalement la nuit est en français. Préfères-tu chanter en français ou en anglais ?
Je ne chante quasiment qu’en anglais car c’est en anglais que j’écris le plus facilement. Cela faisait des années que je ressentais l’envie de chanter en français mais je n’ai jamais trouvé les mots justes. Ce sont les paroles de Dominique A qui m’ont permis de réaliser cette envie. Chanter cette chanson avec lui était absolument magique, je suis très heureuse et honorée de l’avoir à mes côtés sur cet album.
Quel est ton morceau préféré de Natten ? Pourquoi ?
The Razor’s Edge… Elle n’est pas single, pas radio mais pour moi elle est très importante. Mélancolique et lumineuse à la fois donc assez représentative de l’album.
Peux-tu faire découvrir un.e artiste suédois.e à nos lecteurs ?
Peter Von Poehl (un Suédois qui vit à Paris comme moi), j’adore ce qu’il fait ! Écoutez son album Sympathetic Magic, c’est sublime.
Une chanson qui te met de bonne humeur ?
Last Nite – The Strokes
Presque six ans après le film Demain, pour lequel tu as composé la BO, es-tu confiante pour l’écologie, pour notre futur ?
Confiante non, mais j’ai de l’espoir. On parle de plus en plus de la situation écologique et je pense qu’il y a une certaine prise de conscience. Après il ne nous reste pas beaucoup de temps, on n’avance pas assez vite sur ces questions. Il est urgent de passer à la vitesse supérieure.
Est-ce un challenge de sortir ton album en ces temps incertains ?
Oui, surtout sans concerts, c’est très difficile. En même temps je trouverais ça insupportable de juste attendre un potentiel « meilleur moment ». Nous avons tous besoin de nous nourrir l’esprit, encore plus pendant cette période d’isolement social, donc finalement sortir de la nouvelle musique est probablement la meilleure chose que je puisse faire aujourd’hui.
As-tu des projets pour cette année 2021 ?
Je sors l’album en mars et après je rêve de faire un tournée pour pouvoir chanter ces chansons en live devant un public. J’espère tellement que ce sera possible ! Je croise tous mes doigts pour le concert au Café de la Danse le 26 mai. Et sinon je suis en train de travailler sur des projets de musique de film (quelques paroles pour le nouveau film de Cyril Dion ANIMAL et la bande originale du premier long métrage d’une jeune réalisatrice italienne Laura Samani SMALL BODY).