Cet article est une entrée en matière sur le sujet de l’utilisation des « nouveaux outils » comme les téléphones dans le monde de l’art contemporain. Le smartphone avec son objectif photo va nous permettre d’en connaître un peu plus sur le sujet.

Photo de Andrea Zanenga sur Unsplash

Article écrit par L.N

iPhonographie

Née dans les années 2000, la photographie mobile désormais surnommée « iPhonographie » utilise le smartphone pour photographier et retoucher. Le phénomène prend de l’ampleur grâce aux améliorations technologiques des objectifs. Ainsi, photographier le quotidien devient plus accessible et cela conduit la photographie à faire partie de notre vie quotidienne. L’accès à ce médium se désacralise et tout le monde devient « photographe » avec son téléphone. Mais peut-on devenir artiste ou faire de l’art avec un téléphone portable ?

L’accès des enfants et adolescents aux écrans est de plus en plus facile. Les adultes sont face à la démocratisation des smartphones. Les appareils photo des téléphones portables sont de plus en plus performants. La visibilité des clichés par voie numérique est transcendée par les réseaux sociaux.

Prendre des photos de vacances ou immortaliser des souvenirs sont des actions qui sont accessibles à tout le monde. Mais le mouvement de la iPhonographie poursuit un but plus artistique. Comme tout mouvement artistique ou avancée technologique, il y a des réticences. Cet art accessible à tous peut nuire aux photographes selon certains avis.

L’outil photographique et les réseaux sociaux

En 1888, George Eastman révolutionne la photographie en inventant le premier appareil photographique portable, le Kodak, qui facilite la pratique de la photographie au grand public. En 1913, Oskar Barnack, crée la Leica, un appareil photo léger et de petit format. Cet appareil peu cher et peu encombrant désacralise la photographie réservée habituellement aux photographes professionnels. Certains pensent que l’arrivée de l’iPhone universalise la photographie, ce qui crée une certaine tendance à suivre la vie d’autrui sur les réseaux sociaux (une forme de voyeurisme consenti, où l’instant le plus banal d’une journée dépasse les 100 likes), ce qui détruirait le métier des photographes. Les entreprises emploient des photographes amateurs pour faire des photos avec leurs smartphones, afin d’obtenir des photographies instantanées.

Il y a tout de même un aspect positif : ces changements montrent que l’on a plus besoin d’appareils chers pour réaliser une belle photographie. Serait-ce donc la mort de la photographie ? Cela peut être le déclin de l’appareil photo reflex (même si nous sommes face de plus en plus à un retour aux argentiques et aux appareils jetables). François Cheval, ancien directeur du Musée Nicéphore-Niépce affirme que « L’utilisation du smartphone est une pratique populaire, universelle, personnelle et collective. Jamais, dans l’histoire de la photo, il n’y a eu tant de possibilités, c’est extraordinaire ». Nous sommes en contact avec un art plus démocratique avec les réseaux sociaux, qui permettent une forme de retour instantanée, si l’on oublie tous les commentaires inutiles, bien évidemment.

The Kodak camera, 1888. at Science and Society Picture Library

Le selfie

Abordons cet article sous le prisme d’une tendance photographique liée au monde des réseaux sociaux : le selfie. L’art de la photographie est devenu de plus en plus accessible à tous avec ces diverses évolutions. Les webcams et les téléphones portables font évoluer le sujet et le quotidien devient une source d’inspiration. La consécration du selfie a profondément lié la photographie aux réseaux sociaux : vivre à travers les autres, la jalousie, le narcissisme, passer à côté de l’instant présent… mais qu’en est-il de l’utilisation du téléphone portable dans le monde de l’art ?

L’art contemporain et le téléphone portable

La Galerie Mobile Camera Club dans le IXe arrondissement de Paris a ouvert ses portes afin d’accueillir des photographes qui utilisent leurs smartphones.  Si on parle des photographies sur les réseaux sociaux, on peut aussi parler des filtres et des effets. Quelle est la réalité ? Cette tendance à vouloir « lisser les photographies pour coller aux tendances des réseaux sociaux conduit les utilisateurs à créer une fausse réalité ». Certes, la photographie est une interprétation du réel. Le photographe favorise un cadrage, une lumière et c’est son choix. La réalité se représente en 3D, avec des sons et des émotions. C’est une question très large où l’histoire de l’art et la philosophie entrent en jeu, donc concentrons-nous sur notre question de départ. Dans le cadre de la biennale de Lyon en 2013, Xavier Cha réalise une performance Disembodied Selfie, où il représente notre époque, en particulier cette auto-représentation de plus en plus médiatisée par l’omniprésence du voyeurisme numérique. Il erre au milieu de l’exposition et poste des selfies devant les œuvres d’art. Dans le monde de la performance, Amalia Ulman réalise Excellences & Perfections , performance décalée où sa vie devient une semi-fiction à base de selfies dans un univers californien. Cette performance est présentée lors de l’exposition Performing for the Camera, à la Tate Modern en 2016. Cette pratique du selfie prend de l’ampleur sur les réseaux sociaux. La galerie Saatchi à Londres a consacré une de ses expositions sur ce thème From Selfie to Self-Expression  en 2017, un historique de l’autoportrait allant jusqu’à un concours de selfies. Le selfie suit cette lignée de l’autoportrait : Cindy Sherman joue avec des visions d’elle déformées sur Instagram où elle ne montre que les filtres, retouches poussées à leur maximum et qui peuvent transformer une photo jusqu’à réinventer la forme du sujet.

En dehors des selfies, c’est avec le photojournalisme que la mobile photography prend de l’ampleur grâce à sa spontanéité lors de la prise de vues. Ben Lowy s’est emparé de cet outil et du logiciel Hisptamatic afin de photographier la révolution libyenne.

Enfin, le confinement de 2020 a aussi permis aux artistes d’expérimenter cet outil. L’exemple le plus parlant qui traite de notre quotidien de manière humoristique et décalé est le compte Instagram de Philémon Vanorlé avec ses Quarantaine de l’art confiné.

Pour conclure, la réponse à la question « peut-on faire de l’art avec notre téléphone portable ? » ne peut se résoudre par un simple oui ou non. Elle est remplie d’avis, d’opinions qui font évoluer ce genre de questionnement. Alors, qu’en as-tu pensé ? Connais-tu des artistes qui utilisent le téléphone comme outil photographique ?