Maïté a 34 ans et tient une friperie à Lille nommée Maïterama Vintage. C’est après des études artistiques à Saint Luc et une alternance dans un studio photo qu’elle s’est lancée dans le milieu du vintage. En parallèle, elle est styliste photo, milieu dans lequel elle baigne depuis petite. 

Propos recueillis par Eva Darré-Presa

Salut Maïté ! Comment as-tu commencé la fripes ? 

J’ai commencé la friperie parce que je faisais des ventes dans des bars, avec des copines, et ça fonctionnait bien. Après on s’est quittées et j’ai continué toute seule. J’avais un bureau en bas de chez moi que j’utilisais pas, et je me suis dit que j’allais en faire une boutique. Donc je me suis motivée, j’ai fait quelques travaux et voilà, j’ai fait une petite boutique. Mais j’ouvre qu’une fois par semaine parce que je travaille à côté et j’ai pas envie non plus de faire que ça.

Je me suis rappelée il y a pas longtemps avec les souvenirs Facebook, qu’il y a douze ans j’avais créé un Skyblog genre « un dimanche vintage ». Donc je vendais déjà des trucs rétro il y a plus de douze ans ! J’avais déjà le mot vintage en bouche. Et je faisais aussi des ventes chez moi, deux fois par an, où j’invitais toutes mes copines et je revendais mes sapes que j’avais acheté ou que j’avais en trop.

Est-ce que tu as totalement arrêté la fast fashion ?

Alors on va dire à 99% parce que, quand je vois une paire de pompes, clairement je craque dessus. J’adore les chaussures ! La dernière fois je passais rue de la Clef, j’ai vu une paire de Nike, je l’ai achetée. Le seul truc que j’achète encore neuf c’est mes sous-vêtements. Par contre je me fais plaisir et j’achète des bonnes marques en soldes.

Le dernier truc que j’ai acheté en fast fashion c’était chez Zara, il y a quatre ans maintenant. C’était une doudoune, elle était trop belle, je l’ai encore d’ailleurs. Elle est un peu moins belle… Je suis sortie de là, j’ai vu une meuf avec la même. Et je crois que ça lui allait mieux ! Et la je me suis dit, « c’est bon Maïté, arrête ». Je l’ai payée 80 balles et au bout de trois mois elle avait déjà un peu perdu de son brillant, elle était plus aussi top. Donc ça m’a vraiment fait le déclic.

Les odeurs des habits me dérangent beaucoup aussi. Les produits qu’on met dessus. J’ai un nez assez sensible et ça me prend le nez des fois ! La lumière de ce genre de magasins aussi. Je me sens agressée !

Là, pour mes cadeaux de Noël, j’ai essayé de faire des trucs non-palpables. Par exemple j’ai offert un cours de yoga à ma mère, mon mec je lui ai offert du sport. J’ai pas vraiment acheté d’objets.

Comment chines-tu les pièces de ta boutique ?

En hiver, c’est la période la plus triste pour moi parce qu’il y a pas les braderies. Quand c’est les bonnes périodes, je fais que de la braderie, j’adore. Mais clairement j’en fais deux ou trois par jour le weekend. Je pars tôt le matin et j’y vais jusqu’à ce que ma voiture ou mon caddie soit rempli. Je prends une certaine somme et quand j’ai plus de sous, j’ai plus de sous. Sauf si je croise une pièce de dingue.

Et l’hiver, c’est Internet, c’est les petites mamies que je rencontre et avec qui je papote. Je trie aussi beaucoup mon dressing. Emmaüs, j’y vais plus trop. Il y a aussi beaucoup de gens de Lille qui vont à Emmaüs et ça m’est déjà arrivé de mettre la main sur une fringue avec quelqu’un qui fait aussi du vintage à Lille et limite c’était des couteaux dans les yeux et la personne tirait la fringue comme une malade. On dirait limite le début du Black Friday !

Comment fixes-tu les prix dans ta boutique ?

Par rapport au prix d’achat. Je veux vraiment rester une fripe abordable. Je veux que pour 50-60€ tu puisses t’habiller de la tête aux pieds dans ma boutique. Les pantalons c’est 12 balles, 15 si c’est des Levi’s. Je reste à peu près dans les mêmes gammes.

Est-ce que tu trouves que le vintage est devenu un phénomène de mode ?

Totalement. J’avais vu une blogueuse qui parlait de ça et ils avaient recréé des collections, genre à Primark, style vintage. Sauf qu’on sait comment c’est fait donc j’ai trouvé ça ouf. Donc oui, c’est un effet de mode. Même le mot vintage me donne envie de dégueuler. J’attends avec impatience le nouveau mot qu’on va mettre à la place de vintage. Il y aura une nouvelle façon de le dire.

Qu’est ce que tu penses des influenceuses spécialisées dans le vintage et qui le rendent populaire, tendance ?

Je trouve ça bien justement. Il y a des gens qui n’en ont pas encore forcément pris conscience. Je peux pas forcement juger puisque dans mon entourage tout le monde est dedans. Je comprends pas comment certaines personnes n’en ont toujours pas entendu parler. Je sais que France 3 est venu il n’y a pas longtemps et la journaliste m’interviewait comme si c’était un truc tout nouveau.

Tu penses peut être à Clara (ndlr : @claravictorya). J’aime beaucoup. Elle était venue dans boutique. Je regarde ses vidéos où elle reprend des fringues et elle fait des trucs supers !

Est-ce que t’as une pièce vintage préférée dans ta garde-robe ?

C’est rigolo parce que je me suis demandé la dernière fois « S’il y a le feu, qu’est ce que je sauve ? ». Bah c’est dur ! Je pense que c’est des trucs de famille qu’on m’a donnés. J’ai des manteaux de ma grand-mère, de ma mère. Ah si, j’ai la tenue de mariage de ma mère. En fait, elle est revenue du Pérou et elle s’est mariée le lendemain. Donc elle était en habit péruvien pour se marier ! Donc c’est un huipil péruvien, une sorte de haut très coloré avec un jean. Et elle avait mis la ceinture dans les cheveux ! C’est dans les tons violets, rouges. Je le porte l’été, il est vraiment joli. Et les couleurs n’ont pas bougé alors qu’il a quarante ans.

Tu réalises un vrai travail esthétique lors des shooting photos. Comment prépares-tu cet univers ?

Souvent ça part des fringues que je chine. Je fais ma tenue, je la mets de côté. Soit j’ai déjà l’idée de la modèle : par exemple, il y a une fille avec qui je travaille souvent. Quand je vois la fringue je me dis que c’est pour elle. Sinon je fouille sur insta, je trouve les modèles, je monte l’équipe photographe et make-up.

Pour le lieu, j’ai un listing. C’est vraiment que du feeling, du ressenti. On a fait un shoot à la droguerie de Lille, un magasin de perles. J’avais deux tenues un peu 70’s et je me suis dit que ça allait le faire. On a fait un autre shoot chez Toto et j’avais des tenues hyper colorées en lycra et je me suis dit que ça serait nickel. Je me crée une histoire dans ma tête et c’est comme ça qu’on fait le shooting.

Est-ce que tu as d’autres projets d’évolution ?

Je vais ouvrir un jour de plus, le premier mercredi du mois, parce que je sais que certains ne sont pas dispos le week-end. J’aimerais bien faire plus de shooting photos. Je me dis que je vais finir comme mon père, photographe ! Peut-être pas, mais j’aimerais faire des shooting plus délurés, à la Vogue, style édito.

Est-ce que tu as un conseil pour quelqu’un qui aimerait se tourner vers la mode durable ?

Aller chiner ou se mettre sur Vinted !

La boutique est ouverte tous les samedis et le premier mercredi de chaque mois.