Vous le connaissez peut-être en tant que graphiste sous le nom de Mcbess, mais Matthieu Bessudo fait aussi de la musique sous le nom de Mcbaise. Il sort aujourd’hui son troisième album, TUBES, savant mélange de synthé-pop à la Mac Demarco et de sexysynthé à la Connan Mockasin. Car de Shakespeare à Pierre Bachelet, il n’y a qu’un pas et il s’appelle Mcbaise. 

Propos recueillis par Eva Darré-Presa

Par quoi as-tu commencé, la musique ou le graphisme ? 

J’ai toujours été dans la musique, depuis petit. Après le bac je suis parti faire des études de graphisme, je voulais être batteur de punk mais à Cannes il n’y avait pas vraiment de carrière pour ça. Mes parents m’ont poussé à partir dans la 3D. Je suis ensuite parti à Londres pour le travail mais la musique a été là, groupe après groupe. C’est vraiment dans ces huit dernières années que c’est vraiment devenu sérieux. 

Est-ce que ton processus de création est le même en musique qu’en graphisme ? 

C’est pas super loin, je pense que la recette est là même si c’est moi qui le fait. Ce sera fait avec la même dose de patience ou d’impatience ! C’est vrai qu’il y en a un qui est beaucoup plus sur l’instant, la musique, alors que le graphisme se travaille sur le long terme. Mais c’est vrai qu’il y a cette manière de layerer qui est assez similaire. Je ne sais pas si j’ai la même approche, mais peut-être qu’en vieillissant ça le devient ! Je n’ai pas encore assez de recul pour être éloquent là-dessus. 

En parlant de layering, tu as écrit les parties de chaque instrument, pourquoi avoir fonctionné comme ça pour cet album ? 

Sur mon tout premier album en tant que Mcbaise, j’ai tout fait sur ordinateur donc tout était écrit. Mais au fur et à mesure des enregistrements c’est vrai qu’il y a des instruments, comme la batterie, qui pour moi étaient très répétitifs. C’est pas forcément très mélodieux. J’ai voulu faire justement plus attention à la batterie en l’écrivant et en faisant en sorte qu’il n’y ait pas de ghost notes ou de feal. Il n’y a pas d’égo de batteur parce que justement tout est écrit.  

C’est quoi ton attraction préférée dans un parc aquatique ? 

Les toboggans c’est très cool mais je crois que j’aime bien les bouées dans les canyons ! 

Dans ton album précédent, Windowsill, tu as créé une bande-son de vieux films érotiques. On ressent encore cette esthétique d’érotisme kitsch, presque cartoon dans ce nouvel album, comment arrives-tu à mêler cet humour au sexe pour créer un album de bedroom pop, au sens le plus littéral ? 

À chaque fois que j’écris pour Mcbaise, j’essaie de référencer mes influences de mon enfance à mes 18 ans. Quand je retourne dans ma région natale, une à deux fois par an, je la trouve toujours aussi magnifique. Mais après deux-trois jours je sais pourquoi je suis parti. J’ai commencé à boire du pastis à Londres, comme une crise identitaire du gars du sud ! Comme pour le dessin, c’est beaucoup de cartoon des années 1930 parce que j’ai grandi là-dedans, mon père en matait masse. 

Pour la musique, ce qui résonnait le plus pour quelqu’un comme moi qui a fait beaucoup de rock et de métal, c’était de faire quelque chose que je contrôlais pas mal. Et ce que je contrôle pas mal, c’est évidemment du vécu et donc sortir du collège à Cannes, c’est les palmiers et écouter du Doc Gynéco. Je ne suis pas quelqu’un de très sérieux, je ne veux pas faire de la musique comique non plus, mais je pense que c’est toujours injecter un peu de second degré sans devenir Patrick Sébastien. C’est jamais Patrick Bruel ni Patrick Sébastien, c’est un Patrick entre les deux ! 

Et le côté sexe, c’est juste parce que c’est marrant. C’est aussi le souvenir de quand on avait quinze ans et qu’on n’avait pas le droit de regarder Canal +. Tout est référencé, je n’ai pas l’impression d’avoir emprunté quelque chose à qui que ce soit, même si j’imagine que beaucoup de personnes ont eu la même enfance que moi. 

Ce qui rend le projet d’autant plus précieux si on arrive à s’y identifier ?

Voilà, je pense qu’on a tous des souvenirs en commun. J’imagine que c’est comme les chefs qui font des plats qui leur rappellent leur enfance, genre la tomate de leur mamie. Quand certaines personnes vont dans leurs restaurants, ils y retrouvent un ersatz, un souvenir similaire qui les touche tout autant. C’est peut-être pareil dans la musique, ou dans l’art en général.  

Pourquoi avoir choisi McBaise comme nom de scène et ne pas avoir gardé McBess ? 

C’était pas le choix le plus judicieux ! Mais maintenant je l’arbore fièrement. Quand j’ai commencé à faire ces tracks là et à m’éloigner du stoner psyché que je faisais avant, je me rappelle avoir commencé à écouter Connan Mockasin. J’ai toujours écouté du funk mais quand je suis arrivé à créer de la musique, je me cantonais à des trucs un peu heavy. Donc je me suis dit que j’allais tester de faire un truc très relax, et un de mes potes s’est gentiment foutu de moi et a commencé à m’appeler Mcbaise, parce que c’est un peu de la musique de chambre. 

J’ai trouvé que ça avait beaucoup trop de sens pour ne pas l’utiliser ! Mais on l’a vu en festival, les gens pensent qu’on est un groupe de hip-hop, M.C. Baise. Mais c’est rigolo, ça me fait plaisir.

Tu as collaboré avec Muthi, qui sortira son premier album VISION chez Dirty Melody Records le 4 juin, sur l’EP Hors d’Oeuvres. Pourquoi avoir choisi de créer un projet à part entière plutôt que d’inclure ces titres sur vos albums respectifs ? 

Muthi c’est le projet de Matt Christensen, qui est batteur dans le groupe de métal dans lequel je joue, Heavy Menthol, il était aussi le batteur sur Windowsill. Pendant le dernier confinement il a écrit un album, c’est la première fois qu’il écrivait de la musique. J’ai trop kiffé l’album donc je lui ai dit qu’on allait le produire. 

Il m’a demandé de jouer la basse sur son album et la raison pour laquelle on a fait un EP avec les deux tracks ensemble c’est parce que ça avait du sens de voir à quel endroit les projet se rejoignait, même si Matt ne fait pas partie du groupe. C’était aussi une façon un peu hip hop de donner de la visibilité à son projet. Se faire découvrir dans cet océan de release c’est pas simple, donc en tant que chef du label, j’essaie le plus possible de trouver des techniques pour faire découvrir les artistes. Surtout pour Muthi, je trouve que c’est un super album. 

Tu viens de sortir le clip déjanté de COBRA avec Muthi, comment s’est passée la collaboration avec le réalisateur Bruno Bolla ? Est-ce que vous aviez déjà des idées en tête ou vous lui avez laissé carte blanche ? 

Bruno c’est encore un ami de Grasse, il est à Londres avec moi. Il navigue dans ce même milieu de production graphique et vidéo, il est extrêmement talentueux. On avait une idée de clip pour une autre tracks de TUBES mais qui nous demande plus de ressources. 

L’idée pour COBRA c’était “ok, on a une track qui sort dans deux semaines, on n’a pas de clip et on est toujours fort pour boire une bière pour penser à des idées farfelues de clips mais on n’est pas très fort pour utiliser les moyens du bord et s’y coller”. 

Alors on n’avait pas le temps de chercher des acteurs, Matt et moi on joue hyper mal donc il fallait sourire tout le long du clip parce que c’était impossible d’avoir l’air sérieux ! Il s’avère que ça nous donne une attitude de gars tarés, ce qui marque hyper bien. On a tourné ça en deux jours, une semaine avant la sortie.

Bruno était le réal, j’étais toujours là pour donner son avis mais je lui fais 100% confiance, on a les mêmes influences. Ça nous a trop chauffé pour en faire d’autres !

C’est vrai que le clip est chouette, on dirait un mélange déjanté entre Quentin Dupieux et David Lynch.

On était très inspiré par Good Time ! On s’est bien marré, il faisait froid mais ça nous a aussi prouvé qu’on pouvait le faire. On a pu tester des trucs, comme les passages en voiture tournés en studio, c’est quelque chose qu’on n’avait jamais fait. On a fait tourner des lampes autour de la voiture pour faire des gyrophares ! 

Le meilleur album pour une session caliente

Je pense en classique, Soft Hair de Connan Mockasin et LA Priest.

Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter de beau pour la suite ?

Juste que ça continue comme ça ! On a un autre clip qui sort le 11 juin et qui sera animé. Je suis en train de le finir. On peut me souhaiter que ça marche aussi bien que les autres clips et je pourrai partir relax en vacances cet été ! 

Vous pouvez retrouver Mcbaise sur Facebook et Instagram.